Suite au passage de ma qualification biplace, voici un petit retour d’expérience sur cette formation.
1/ Contexte personnel
Je me suis engagée dans la qualification biplace pour plusieurs raisons :
- Envie de faire partager cette expérience à mes amis, à d’autres personnes ne pouvant pas pratiquer
- Envie de découvrir une autre facette du parapente
- Qualification nécessaire pour s’engager dans le monitorat fédéral, démarche que nous avons initiée avec David et Franck
- Et aussi par ego mal placé, il faut rester honnête : « on » ne voulait pas me valider mon BPC « parce que ça ouvrait la porte à d’autres choses » - c’est-à-dire la QBI, et que je n’avais pas le gabarit « adapté » ; adorant la discrimination sur mes 1,54m / 51 kg, je voulais aussi prouver que c’était envisageable, en s’adaptant (matériel, choix des passagers, technique personnelle)
2/ Formation
Elle se décompose en 2 temps :
- Préformation : 2 jours en école, pour vérifier les aptitudes de pilote solo et début de pente école en biplace (mai 2023 pour moi)
o Exigence surtout sur la qualité des décollages (bonne décomposition des différentes phases de décollage, techniques dos et face voile maîtrisées), des atterrissages (construction lisible des approches, absence de virage engagés près du sol, longue finale), et des exercices (tangage, roulis, 360 en sortie dissipée ou chandelle)
o Début du gonflage en biplace ; j’ai vite compris qu’il fallait que je trouve un matériel adapté, qui ne me demande pas d’avoir les élévateurs au dessus de la tête et qui gonfle « facilement »
- Formation (compactée pour moi, en juin 2024) : 6 jours en école
o Théorie du biplace : les particularités du vol en biplace, au niveau réglementaire, et surtout au niveau pilotage (conséquence des charges alaires différentes, gestion du passager)
o Pratique : à la fois en tant que pilote et en tant que passager
§ Pente école
§ Travail en grand vol : décollage, approches, exercices en vol è 7 biplaces en tant que pilote, 8 biplaces en tant que passager
NB :
J’ai choisi de réfléchir à mon matériel avant d’entrer en formation compactée : léger, confortable, « facile »
Mon matériel :
- Une sellette Kortel Karver II en taille S, avec un module biplace : en cas de posé fort, l’impact se porte au niveau des hanches et non sur le dos… idéal petit poids
- Une voile Advance Pibi PTV 100-180, de 37 m² : légère, facile au gonflage, en allongement 5,4, ENB ; cela me permet d’emmener des passagers à partir de 35 kg
- Des écarteurs souples pour avoir toujours accès à mes commandes (je suis déjà en bout de bras) et éviter l’effet de lacet en pilotage
- Une sellette passager avec airbag Supair VIP light
- Un secours léger Companion SQR de PTV 190 ; j’aurais pu prendre un PTV moins important, mais je peux aussi prêter mon matériel et je ne voulais pas que ce soit une contrainte
3/ Statut d’aspirant biplaceur
Nous avons 2 ans pour préparer l’examen final, avec un statut d’aspirant biplaceur : possibilité de voler en biplace avec un passager licencié volant FFVL ou avec un passager non volant si la pratique est encadrée par un moniteur.
Je me suis mise en mode « préparation d’examen » depuis mi-février 2025, avec un examen prévu les 22 et 23 mars :
- Je m’étais fixé un objectif minimal de carnet de vols de 20 biplaces en tant qu’aspirant : au final, 20, pile poil, pas un de plus mais pas un de moins non plus !
- Travail de la théorie ; je l’avais déjà travaillée avec Franck pour passer sa propre QBI, et ce n’est pas le point qui me pose le plus de difficultés
Petit retour mes choix, mes difficultés, quelques enseignements :
- J’ai choisi de me remettre en situation de pilote initial, en augmentant les nouveautés une par une :
- Vol sur site connu (et où je passais l’examen… et où j’habite aussi) : Saint Hilaire, avec les 3 décollages différents et l’atterrissage de Lumbin ; j’avoue avoir opté pour l’ « efficacité » et la praticité pour préparer l’examen
- Si je n’ai pas multiplié les sites de vol, j’ai voulu varier les passagers : 9 passagers différents, allant d’1m65 à 1m84, de 61 à 94 kg è très riche d’enseignement, tant au niveau humain (briefing, gestion du passager au sol et en l’air, ma propre gestion personnelle) qu’au niveau technique (phases de décollages, différentes pentes de décollage, différentes aérologies, approches, phase finale de freinage…)
- Vols en aérologies différentes, gestion des trims, des régimes de vol
- J’ai voulu me sentir pleinement autonome, sans stress qui est forcément communiqué au passager (gros travail… merci Pascal pour tes retours…)
- La préparation de l’examen demande quand même pas mal d’énergie au niveau logistique pour l’alignement des planètes : avoir de la disponibilité, un copain licencié volant également disponible (et volontaire pour être passager… avec un gabarit pas trop lourd…), un créneau météo favorable (oui, entre mi février et mi mars, j’ai été joueuse…), une possibilité de navette
- J’ai « concentré » ma préparation sur une courte période. Il a fallu gérer ma fatigue : enchaîner les jours de vol, les rotations, gérer mon stress, celui du passager, me fixer des objectifs de travail à chaque vol pour améliorer ma technique, me debriefer (seule ou avec les copains, avec ou sans l’appui de vidéos), me recaler par rapport aux exigences du biplace… Je volais aussi en solo, et un jour j’ai choisi d’aller poser par fatigue physique et mentale. Et ranger le parapente pendant quelques jours, pour retrouver l’envie de voler.
- La priorité reste le passager (bon, ça peut être super évident pour certains…) ; mais en phase d’apprentissage, j’ai eu tendance à l’oublier et me concentrer sur ma technique et la sécurité. Mon cerveau n’arrive à faire qu’une seule chose à la fois : en phase de décollage et d’approche, je me vois bien moins disponible pour papoter avec le passager… mais ça s’améliore avec l’expérience… je serai bientôt plus loquace !
- Je me suis en fait sentie sereine dès que je choisis de décoller. Dans l’action, je ne ressens pas de stress délétère, plutôt du stress positif et des décisions adaptées malgré quelques petites « surprises » :
- Une mauvaise prévol et un décollage avec une petite cravate en bout d’aile : j’ai réussi à la défaire en vol, après deux tentatives, et le passager ne s’en ait pas rendu compte ; pourtant j’étais en bon appui sellette du côté ouvert pour maintenir le cap
- Un choix de décollage dans une aérologie trop forte : un manque de portance en sortie de décollage et une jolie fermeture asymétrique dans l’entrée dans le thermique… quelle chance d’avoir un passager en pleine confiance…
- Un passager qui fait un arrêt de course, ne sentant pas la portance de la voile, alors que je n’ai déjà plus les pieds au sol et que je ne peux donc plus arrêter le décollage
- 3 biplaces et des ailes solo en approche en même temps… : on a pu faire des approches lisibles et se séparer le terrain, sans rentrer dans la trainée des autres ailes
- De la vitesse… ! J’ai bien compris l’impact de la polaire des vitesses…
- J’ai pris du plaisir à partager ces quelques minutes de vol avec les copains, même si j’étais concentrée sur mon examen. J’ai hâte de pouvoir en refaire.
4/ Examen final
Au regard de la météo, honnêtement, je pensais que l’examen serait annulé.
Il y avait encore 100 km/h de vent du sud prévu jeudi soir pour le we sur Saint Hilaire.
Mais oh surprise : on reçoit un mail le vendredi 12h, nous donnant rdv à 7h30 le lendemain.
Samedi :
- Vérification du matériel
- 1ère rotation : mon binôme préfère être pilote ; avec le sud qui forcit, on sent la tension au décollage… mais les 4 équipages s’envolent…
- Pente école avec parcours slalomé en biplace avec le passager : des retours sur notre gestion du tangage et du roulis, notre gestuelle pour orienter la voile avant le déplacement
- Examen théorique écrit avec 3 questions / 2h pour répondre :
o Des passagers qui mènent à la charge alaire minimale et maximale de l’aile : schéma de la polaire des vitesses, conséquences sur toutes les étapes du vol, gestion du passager
o Les avantages et inconvénients des trims souples, et justification de son choix personnel
o Notre démarche quand nous arrivons sur un site de vol non connu
Dimanche :
- Le Sud est encore bien présent ; les examinateurs temporisent… J’avoue être soulagée, je n’ai pas envie de voler dans ces conditions, où je ne vole même pas en solo… On attend plus d’1h au décollage… Je reste dans ma bulle, je sais que le parawaiting peut être épuisant… Puis miracle, le Sud tombe è je peux même faire un décollage dos voile !
- On enchaine les 3 rotations restantes
- Gros soulagement collectif à la fin des vols !
- Et un debriefing collectif l’après-midi, personnalisé avec des pistes de travail et de progression
- Au final, pour moi, ce sera 2 vols avec un passager de 67 kg :
o Un décollage dos voile du décollage sud, avec un atterrissage sur le site de Lumbin
o Un décollage face voile du décollage est, avec deux tours en 360 avec sortie dissipée, et un atterrissage sur l’ancien atterrissage delta
Les examinateurs ont été top :
- Ils ont tout de suite désamorcé le stress collectif par rapport à la météo, nous disant qu’on pouvait refuser le vol sans conséquence sur l’examen
- Ils ont pris une posture d’examinateur, mais aussi de formateur pour nous aider dans notre progression
- Ils ont systématiquement fait un debriefing collectif mais personnalisé, pour nous aider
- L’examen théorique n’était pas « piégeux », avec des questions claires et adaptées au biplace et l’analyse nécessaire à faire en tant que pilote responsable
Avec mon dernier vol d’examen, j’ai franchi la barre des 700 vols ! J
5/ Et maintenant ?
Et bien c’est juste le début…
Je souhaite poursuivre le biplace de manière régulière pour poursuivre ma progression et ancrer des automatismes.
Le travail continue donc, avec plusieurs axes :
- Emmener des passagers non volants… et des volants aussi ! ce n’est pas la même gestion du passager, il y a des « avantages » et des « inconvénients » dans les deux situations
- Multiplier les sites de vol, en choisissant :
o Des sites déjà pratiqués en solo
o Des décollages et des atterrissages « faciles »
o Des aérologies variables
- En fonction des demandes des passagers, proposer des vols plus ou moins longs
- Etre progressif dans les vols… il me reste une vie pour voler, je ne compte pas l’écourter…
Merci à mes passagers volontaires : sans vous, impossible de préparer l’examen…
- De Tassin Parapente : Pascal S, Vito, David, Franck G, Hervé, Pierre S, Michel D
- De Saint Hilaire : Eric et Jean-Claude
Merci aux navetteurs :
- Franck D, Marie-Pascale, David
- Les copains de Saint Hilaire
- Aux personnes qui prennent les pilotes en autostop
Et merci aux vidéastes :
- Vito, Marie-Pascale, Franck G, Nanda
Hélène